19.02.13 Le Potentiel – La RDC sur les traces de la Yougoslavie et du Soudan

Déclaration de Johnnie Carson à The Brookings Institution

Le soutien des Etats-Unis à l’accord de paix des Nations unies pour la stabilisation de la partie de la RDC n’est pas le fait du hasard. Sinon, rien ne saurait justifier la dernière position de son sous-secrétaire d’Etat aux Affaires africaines, Johnnie Carson. Comme en Yougoslavie et au Soudan, Washington est prêt à accompagner l’ONU à appliquer la même thérapie en RDC. C’est-à-dire la paix contre la partition du pays. Sous l’égide des Nations unies, le retour à la paix dans ces deux pays est passé par là. La recette est sur le point d’être expérimentée en RDC.

Le sort de la République démocratique du Congo a été déjà scellé en haut lieu de la sphère politique mondiale. La matérialisation du vieux projet de balkanisation de la RDC ne serait donc plus qu’une question de temps. Sur le terrain, tout est mis en place pour atteindre cet objectif. C’est via les Nations unies que la partition finale devra être jouée.

Après le dernier report d’Addis-Abeba, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, se rendra, confirment des sources onusiennes, le 24 février 2013 dans la capitale éthiopienne pour la signature de l'accord-cadre régional qui doit permettre de pacifier l'Est de la RDC.

Cet accord-cadre, considéré comme un plan régional de paix par son concepteur, devra être signé par la RDC, le Rwanda, l'Ouganda, le Burundi, l'Angola, le Congo, l'Afrique du Sud et la Tanzanie. Il faut rappeler que ce plan de paix avait été présenté pour la première fois le 28 janvier au sommet de l'Union africaine à Addis-Abeba, mais huit dirigeants africains lui avaient réservé une fin de non recevoir. Au nombre desquels, des chefs d’Etat des Grands Lacs. L'ONU avait, à l’époque, indiqué qu'il ne s'agissait pas de divergences de fond sur le contenu de l'accord mais plutôt d'un problème de procédure.

Le pavé de Washington

Craignant un nouveau report de cet accord de paix, les Etats-Unis ont clairement apporté leur appui à la position défendue par les Nations unies, se démarquant totalement de l’option encore en vigueur au sein de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).

Dans une intervention le 11 février 2013 devant le think tank américain, The Brookings Institution, le sous-secrétaire d'État aux Affaires africaines, Johnnie Carson, a formellement réitéré l’appui des États-Unis à un processus de paix sous l'égide de l’ONU pour la RDC : « Pour la communauté internationale, trouver une solution durable à l’instabilité prolongée en RDC demeurera un défi redoutable ».

Quant à la voie à emprunter, le sous-secrétaire d’Etat américain dit que « la seule manière de procéder consiste à adopter une solution subtile bénéficiant de l’appui de la communauté internationale ». Cette solution-miracle, selon Johnnie Carson, est celle que les Nations unies ont expérimentée en Yougoslavie(Europe) et au Soudan(Afrique).

Aussi a-t-il martelé du haut de la chaire de Bookings Institution : « Nous sommes parvenus à une telle solution pour mettre un terme au conflit dans l’ex-Yougoslavie par le biais des Accords de Dayton. Nous avons réussi à mettre un terme à la plus longue guerre civile qu’ait connue l’Afrique, le conflit au Soudan, grâce à l’Accord de paix global négocié par les États membres de l’EGAD et appuyé par les États-Unis, la Norvège et la Grande-Bretagne.

Il faut maintenant un nouvel effort international dynamique au service de la RDC ». Cela se passe de tout commentaire, car c’est clair comme l’eau de roche. Pour avoir fait recette dans l’ex-Yougoslavie et au Soudan, la recette onusienne est sur le point d’être appliquée à la RDC.

Nous rappelons que le processus de paix mené par les Nations unies a conduit, à terme, à la partition de ces deux pays. La Yougoslavie a disparu et cinq Etats ont été créés sur ses cendres, à savoir : Bosnie-Herzégovine, Croatie, Kosovo, Serbie et Macédoine, Slovénie, Monténégro. Le Soudan a éclaté en une nouvelle République du Soudan et en Sud-Soudan.

Et le point de départ du nouvel effort promis par Carson est cet accord-cadre de paix que les Nations unies feront signer à Addis-Abeba le 24 février 2013. Plutôt réticente sur le projet, la SADC a été presque réduite au silence, obligée de s’allier à la position des Nations unies.

Contrairement au vœu exprimé dernièrement par les pays de la SADC réunis à Maputo (Mozambique), c’est sous mandat de l’ONU, agissant via la Monusco, que devait opérer la force internationale neutre à déployer dans la partie Est de la RDC. Sur le terrain des opérations, l’Onu privilégie l’idée d’une brigade spéciale d’intervention, avec commandement d’un pays de la SADC, notamment la Tanzanie ou l’Afrique du Sud.

Si le projet de la brigade spéciale d’intervention a déjà fait du chemin, les positions qu’elle devra occuper, particulièrement dans la province du Nord-Kivu, restent secrètes. Déployée aux frontières de la RDC avec ses voisins, elle constitue un mécanisme de vérification des mouvements des troupes armées. Déployée à l’intérieur de la RDC (Est), elle aura pour mission de traquer et neutraliser tous les groupes armés indexés comme forces négatives actives dans la région des Grands Lacs. Que prévoit l’accord-cadre de paix de l’ONU à ce sujet ? On n’en sait pas grand-chose. Peut-être la vérité éclatera le 24 février.

The Brookings Institution : la boite à idées des démocrates

C’est devant The Brookings Institution que Johnnie Carson est allée présenter son plan de sortie de crise en RDC. Hasard ou coïncidence ? La très célèbre think tank (boite à idées) américaine est le creuset de toutes les théories montées dans les milieux universitaires et politiques des Etats-Unis, pour soutenir ou laisser tomber un pays dans le monde. Le clan Clinton y a fait ses premiers pas. C’est le cas des familles Clinton et Susan Rice réputées pour être favorables à la partition de la RDC.

Illustration. C’est au sein de The Brookings Institution qu’il a été conçu l’idée selon laquelle la gouvernance et le respect des droits humains sont absents dans plusieurs pays africains qui se distinguent par leur étendue géographique et la densité démographique de leurs populations. Pour cette institution, proche du parti démocrate, plus un pays est grand, plus est difficile. D’où, la conviction que seuls les petits Etats en Afrique peuvent être bien gouvernés.

Prenant le cas de la RDC, The Brookings Institution soutient que l’immensité de son territoire serait à la base des problèmes de gouvernance et autres conflits politiques qui secouent le pays. La solution, selon cette boite à idées, consisterait à morceler en de petits Etats faciles à gouverner.

En s’appuyant sur les exemples de la Yougoslavie et du Soudan pour motiver l’implication effective de l’Onu dans toute solution à mettre en œuvre dans l’Est de la RDC, les Etats-Unis pèchent par une erreur d’analyse. La position défendue par Washington fait le lit de la balkanisation de la RDC, laquelle n’est plus qu’un secret de polichinelle.

Le comble c’est que l’ONU endosse la responsabilité de morceler la RDC, sous la dictée des USA. Les Congolais doivent rester vigilants et ne pas cautionner n’importe quelle initiative de paix du moment qu’elle procède de l’affaiblissement de la RDC. Que l’on ne s’y trompe pas : la RDC n’est pas la Yougoslavie, encore moins le Soudan.

Encadré

Que signifie exactement le mot « balkanisation » ? A en croire le Petit Larousse, la balkanisation est un processus qui aboutit à la fragmentation en de nombreux Etats de ce qui constituait auparavant une entité territoriale et politique. De son côté, Marc Nouschi, historien et directeur régional des affaires culturelles de Champagne-Ardenne, parle de la balkanisation « comme d’un processus de segmentation de zones multiethniques entre des nationalités qui revendiquent le contrôle de territoires qu’elles ont tendance à sacraliser ». A l’origine, l’expression est employée pour décrire l’éclatement de la région des Balkans après la Première Guerre mondiale. A l’heure actuelle, ce mot fait office de métaphore que l’on utilise dès qu’un endroit du globe connaît une période politique instable.

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