09 03 18 – MNC/L : changer le système, pas seulement remplacer Kabila et les hommes au pouvoir ! dixit François Mutamba Framulo

Le 25 février 2018, vous avez totalisé trois ans à la tête du MNC/L en remplacement de feu Christophe Gbenye, lequel avait succédé à Patrice Lumumba. Pouvez-vous dresser un bilan de votre gestion du Parti. Quelles améliorations et innovations avez-vous apportées, et quels sont les défis à relever ?
Merci beaucoup de votre question très pertinente. Elle me permet  d’éclairer l’opinion sur les dirigeants du MNC/L, son histoire et sa victimisation. En effet, il n’est pas facile de succéder à Lumumba et à Gbenye. Aimé Césaire dit de Lumumba, notre Leader, qu’il était une haute et grande figure, le seul homme politique au Congo et le plus grand d’Afrique. Christophe Gbenya a succédé à notre Leader. De son vivant, ses collaborateurs furent empêchés d’exercer leurs fonctions, pourchassés. Après son assassinat ensemble avec ses deux compagnons Mpolo et Okito, Gbenye prend les rênes du Parti à Kisangani et organise le maquis. A la reprise des activités politiques en 1991, Mobutu et certains Congolais qui se proclamaient lumumbistes créèrent neuf (9) MNC/L dont le MNC/L original et le MNC/L chrétien. Tout cela pour empêcher le parti à fonctionner.
 A  la mort du président Gbenye, une Assemblée extraordinaire élective a mis en place conformément à la loi et aux statuts et règlement du parti, un nouveau Comité National dont je suis Président National.
Pendant ce temps, Evariste Boshab, professeur d’université et juriste de formation alors Vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, envoie à la CENI le nom d’un certain Bofunga, exclu 2 ans avant du parti pour abus et infraction commis, comme leader du MNC/L. En violation de la loi et des statuts et règlement intérieur, Evariste Boshab avec l’intervention de Paola « fille » de feu président Gbenye, se convainc de la simple photo sur laquelle notre Président pose la main sur la tête de Bofunga en guise de bénédiction. La photo, pour lui, est une preuve de transmission des fonctions de Président du Parti à quelqu’un. Nos lettres de protestations sont sans suite.
Vous comprendrez que dans ces conditions notre bilan est rendu difficile. Toutefois, notre Comité a eu pour mission de relancer les activités du parti, le dynamiser et le sauver de la dérive. Nous sommes en train de nous battre et la victoire est certaine. N’oubliez pas que l’impérialisme et ses colllabos nationaux cherchent la disparition du MNC/L depuis sa création le 10 octobre 1958. Ils ne réussiront pas !
Les défis à relever, c’est l’implantation du parti, la recherche des ressources et être  significatif dans les institutions pour faire triompher le panafricanisme et le socialisme.
Quelle est la position de votre parti face à la crise politique aiguë que traverse la RDC en cette période charnière cruciale ? 
 Notre parti s’inquiète de la situation que traverse notre pays. Parce que ça ne va pas du tout. Ça ne va pas parce que les Congolais ne veulent pas suivre les enseignements de Lumumba : combattre le tribalisme, le racisme, le néocolonialisme, combattre le comportement néocolonial de peur, de complexe et de soumission. Il faut poser un véritable diagnostic de nos problèmes : l’impérialisme et ses collabos laïcs et religieux.
Le MNC/L recherche l’alternatique plus que l’alternance car il est convaincu que les occidentaux ne peuvent que dispenser les enseignements de leur maître.
Que dit votre parti du «glissement» du mandat présidentiel, du cycle manifestations – répressions, de la coupure d’internet, de la machine à voter ? 
Le glissement que nous appelons la prolongation des mandats est une situation très gênante. Nous plaignons tous les cas de figure : présidentiel, sénateurs, députés (provinciaux et nationaux), gouverneurs. Les bénéficiaires et les victimes se réfèrent à la Constitution qui devient un fétiche. L’homme politique n’est pas celui qui interprète le mieux la Constitution, qui s’y cache. L’homme politique est celui qui cherche à gérer harmonieusement l’intérêt général. Le fétichisme constitutionnel ne nous avance pas. Ce qui est fondamental est que la démocratie commence par la base. Depuis 2006, les élections locales ne sont pas organisées et l’on se dit démocrate. Les manifestations, répressions, coupure d’internet, machine à voter ne sont que les conséquences de la crise qui frappe notre pays. La crise n’est pas seulement l’arrêt des activités des institutions ; le dysfonctionnement de l’Etat est une crise.
Selon vous, à qui profite la prolifération des groupes armés dans le Kivu et le Kasaï ?
 Les groupes armés profitent aux affairistes  étrangers et nationaux. Il faut rappeler que le Congo avant l’indépendance et après celle-ci est une « affaire des affaires ».
Quel poids politique représente actuellement le MNC/L dans le paysage politique congolais ?
Le MNC/L a une base sociale certaine malgré les apparences. La majorité des Congolais  est lumumbiste. Comme je l’ai dit, le MNC/L est combattu depuis 1958. Avec les jeunes que nous encadrons, nous allons réussir. Les gens ont compris d’où viennent nos malheurs.
Votre parti fait partie des alliés non parlementaires de la Majorité présidentielle. Quels sont les bénéfices que le MNC/L  a engrangés de cette alliance ?
Jusqu’ici, le MNC/L n’a bénéficié d’aucun privilège de la Majorité présidentielle. 
Le PPRD, parti présidentiel, a révisé ses statuts dans la perspective d’une conservation exclusive du pouvoir lors des prochaines élections à tous les niveaux. Ce qui présage déjà la fin de la Majorité présidentielle actuelle qui était, à notre avis, un fourre-tout idéologique. 
Le MNC/L qui se proclame «parti de gauche, progressiste, panafricaniste et SOCIALISTE»,  fera-t-il cavalier seul ou formera-t-il une plate-forme avec d’autres partis qui se réclame de Lumumba comme le PALU d’Antoine Gizenga, le CCU   de Lambert Mende, Mouvement Lumumbiste de Franck Diongo,  etc. ?
Le MNC/L est un parti de gauche, progressiste, panafricaniste et SOCIALISTE. Il ne peut se trouver dans sa peau que dans une plateforme de gauche. Ce qui nous caractérise à gauche, c’est le lumumbisme, le panafricanisme, le socialisme, l’Unité africaine et la Renaissance africaine comme dirait Théophile Obenga.
Nous voudrions préciser à l’intention de l’opinion que n’est pas lumumbiste celui qui s’en réclame ou s’en proclame. Est lumumbiste celui qui suit les enseignements de Patrice Emery Lumumba. Etre enfant de Lumumba, être son frère biologique, tribal ou avoir été son ami, avoir été dans le même gouvernement ne confère pas la qualité de lumumbiste. Les Congolais commencent à beaucoup évoluer dans l’esprit d’alliances. Le MNC/L trouvera sûrement une alliance de gauche. Pourquoi pas avec les amis naturels qui nous ont accompagné dans la lutte de libération. Ceux qui ont seulement la sympathie ou de l’estime envers notre Leader sont des « lumumbiens ».
Quelles sont les visées électoralistes du MNC/L ? (gagner les locales, les législatives, la présidentielle ?) En a-t-il les hommes capables et les moyens ?
 Le MNC/L veut gagner toutes les élections maintenant ou demain. Les hommes ? Nous avons affirmé que la majorité des Congolais est lumumbiste. Les moyens ? Les moyens se cherchent. L’essentiel, c’est l’organisation et la persévérance.
Quel est l’état des relations entre le MNC/L et les autres partis du monde d’obédience socialiste ? Si oui, lesquels ?  Possédez-vous  des alliances ou des projets d’alliances avec eux ?
Le MNC/L doit avoir les relations soutenues avec les partis socialistes du monde entier. Les démarches sont en cours pour raffermir ces alliances et amitiés. Néanmoins, depuis son 19ème Congrès, le Parti Communiste Chinois nous séduit particulièrement par les recommandations qui y ont été prises pour reencadrer notre pratique du socialisme.
La doctrine du MNC/L est le lumumbisme ou, comme vous aimez à le dire, l’ensemble des idées forces de Patrice Lumumba. Partagez-vous ces idées avec les enfants de Patrice Lumumba : François, Juliana… ?
 Le MNC/L entretient des relations chaleureuses avec les enfants de notre Leader et Héros national. Ceux qui suivent les enseignements de Lumumba doivent être avec nous.
Le mot de la fin…
Nous voulons préciser que dans chaque pays à travers le monde, il y a les patriotes d’un côté et les autres de l’autre côté. Ces derniers, laïcs ou religieux, on les appelle les collaborateurs des étrangers ou des ennemis, les hommes importés d’après Bertrand Badie, les traîtres, etc.
Le patriotisme est représenté en RDC par le lumumbisme et en Afrique par le panafricanisme. Le MNC/L n’est pas raciste. Il n’est pas contre le Blanc, le Français, le Belge, l’Américain, l’Anglais, etc. Il  est contre l’Occident entendu comme philosophie de domination, du mépris, d’exploitation et du racisme. Il y a aussi des Jaunes, des Noirs qui sont «occidentalisés ». Il y a des institutions africaines qui sont occidentalisées. L’occidentalisme est né avec le capitalisme. Il n’a pas existé avant celui-ci. Nous précisons qu’en Belgique, en France, en Angleterre, aux Etats-Unis, etc., il y a des hommes et des femmes qui se nourrissent de la philosophie du racisme, du mépris, d’exploitation à l’égard de l’Africain. Ce sont ceux-là qui forment ‘’l’Occident’’. Il ne faut pas confondre la peau blanche avec l’occidentalisme. Sinon Karl Marx, Lénine, Jules Chomé, Jean Van Lirde, Jean-Paul Sartre, etc. ne seraient pas ainsi amis des Noirs et autres hommes de couleur. Nous demandons au peuple belge de persuader les dirigeants belges de se «décoloniser ». Nous demandons aux Africains de se «décoloniser » aussi c’est-à-dire refuser le complexe d’infériorité, la peur, la soumission. 
Merci, Monsieur le Président.
Propos recueillis par ABEDI SALUMU
Journaliste (Journal La Manchette)

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