15 04 18 André-Alain Atundu : « Le choix du dauphin de Kabila ne doit pas occasionner l’éclatement de la majorité »

La
Majorité présidentielle (MP), coalition au pouvoir en RDC, abonde
toujours dans le même sens que le gouvernement. Et ce n’est pas la crise
humanitaire qui changerait la donne. Jeudi 12 mars, à la veille de la
conférence internationale des donateurs sur la RDC, prévue ce vendredi à
Genève, André-Alain Atundu Liongo, porte-parole de la MP, a indiqué à
Jeune Afrique que celle-ci soutenait « absolument » le refus de Kinshasa
de ne pas prendre part à cette rencontre.

Lors de son séjour à
Paris, ce dernier administrateur général du Service national
d’intelligence et de protection (Snip) sous Mobutu, devenu porte-voix de
la MP, est revenu en effet sur les faits saillants de l’actualité
congolaise. De la conférence internationale de donateurs au choix
difficile et risqué du dauphin du président Joseph Kabila, en passant
notamment par la polémique autour de la machine à voter.

Jeune Afrique : N’est-ce pas inquiétant de voir un État en pleine crise humanitaire bouder l’aide humanitaire internationale ? 

André-Alain Atundu Liongo :
C’est pour des raisons de dignité que le gouvernement a pris cette
décision, partagée d’ailleurs par un des donateurs : les Émirats arabes
unis. Car la solidarité humaine demeure certes un droit universellement
reconnu pour tout individu, un groupe d’individus ou une communauté qui
se trouve en difficulté, mais la souveraineté nationale, qui implique la
sauvegarde de la dignité d’un peuple, est un devoir que les
institutions doivent veiller à respecter. Il est inacceptable de
présenter la RDC comme un pays où les problèmes sécuritaires sont du
même niveau que ceux de la Syrie.

Nous soutenons par
ailleurs la décision du gouvernement de créer un fonds de 100 millions
dollars pour des problèmes humanitaires dans notre pays.

La Ceni joue la transparence

À
Kinshasa, la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) a
rendu public, le 6 avril, le fichier électoral nettoyé. Mais des
chiffres revus et corrigés sont loin de rassurer l’opposition. Qu’en
est-il de la coalition au pouvoir ? En êtes-vous satisfaits ? 

L’attitude
de l’opposition est irresponsable et dangereuse. Elle fait montre d’une
grande superficialité en décrétant, sans preuves contraires, que le
fichier électoral n’est pas fiable. Il y a pourtant de la part de la
Ceni une présomption de bonne foi : elle a d’abord enregistré 46
millions d’électeurs et aujourd’hui, après nettoyage, il ne reste que 40
millions. À notre sens, la Ceni joue la transparence.

Certaines
voix s’élèvent pourtant pour dénoncer des chiffres anormalement bas à
Kinshasa et dans les autres régions du pays, réputées favorables à
l’opposition… 

C’est une impression. Il faut que
ces allégations soient soutenues par des faits pertinents. Parce que
les chiffres des électeurs inscrits d’une région à une autre dépendent
d’un certain nombre de circonstances, notamment de l’engouement.

Autre
controverse : les machines à voter. Malgré les critiques, le camp du
président Joseph Kabila continue-t-il à soutenir le recours à ces engins

Confondre les querelles coréo-coréennes sur
les conditions de passation des marchés et la fiabilité de la machine à
voter introduit un amalgame malsain pour notre démocratie. Les dés sont
jetés pour les élections ! Corrigeons les imperfections éventuelles
liées au processus électoral, mais ne créons pas des obstacles à partir
des soupçons injustifiés.

Pourquoi ne pas abandonner l’option de ces machines à voter pour rassurer tout le monde, comme le recommande l’opposition ? 

Il
faut poser la question à qui de droit. Sachez tout de même que la Ceni a
fait recours à la machine à voter – qui est en réalité une imprimante –
parce que l’accord politique du 31 décembre 2016 lui a demandé de
trouver des moyens de diminuer la pénibilité et le coût des opérations
de vote. Tout ne doit pas être politique.

La déclaration de Ramazani Shadary sur le cas de Moïse Katumbi n’est pas un jugement de justice

Sur
le terrain politique, en annonçant sur RFI que l’opposant Moïse Katumbi
sera « bientôt condamné » dans une affaire d’usurpation de nationalité
congolaise, Emmanuel Ramazani Shadary, secrétaire permanent du PPRD,
principal parti de votre coalition, n’a-t-il pas donné raison à ceux qui
accusent la justice congolaise d’être instrumentalisée par le régime ? 

Cela
fait partie de l’ambiance préélectorale. Aucune incidence sur le
processus électoral. D’autant que la déclaration de Ramazani Shadary
n’est pas un jugement de justice. Pour le cas de Moïse Katumbi ou
autres, les juges congolais ne peuvent condamner quelqu’un parce que M.
Ramazani Shadary a parlé, les jugements étant prononcés sur base des
faits pertinents et de l’intime conviction des juges.

En attendant, quand la MP compte-t-elle présenter aux Congolais son candidat à la présidentielle du 23 décembre ? 

Nous
attendons le moment opportun parce que nous devons faire quelques
réglages internes, gérer les ambitions individuelles en fonction de
notre ambition commune de garder le leadership sur la gestion du pays.

Cela
voudrait-il dire que ces « ambitions personnelles » compliquent le
choix du dauphin par le président Kabila, votre « autorité morale » ? 

Choisir
un homme n’est jamais facile. En France par exemple, le Parti
socialiste et Les Républicains ont dû passer par des primaires pour
choisir leur candidat respectif. Nous nous devons de tirer les leçons de
leur expérience et prendre toutes les précautions pour que cette
opération de désignation de notre candidat n’occasionne pas l’éclatement
de la Majorité présidentielle ou son affaiblissement.

Jeune Afrique

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